La Neige du Coucou
En 2005, Jean-Louis Hans a écrit :
"La neige du coucou" aux éditions du terroir.
Un
souffle glacial balayait la crête et dispersait dans l'espace les
derniers flocons de l'hiver.
La forêt sommitale, malmenée, gémissait de
douleur. Les arbres se courbaient, grinçaient, se cramponnaient à
l'humus et résistaient à la force des racines en abandonnant parfois
une branche dans un craquement sonore.
Partout, l'eau courait dans les
prairies pentues en empruntant des rus et des fossés débordés par la
fonte des neiges et les récentes pluies de mars. Sentinelle immobile
dissimulée dans un épicéa, un cassenoix moucheté, sans doute intrigué,
lança son cri rauque à l'instant où il aperçut deux silhouettes à
apparence humaine qui progressaient difficilement sur le sentier qui
mène à la pierre des Quatre-Communes.
Encapuchonnés et bottés, trempés
et hagards, faces et mains rougies par le froid, les deux hommes se
suivaient en silence en ignorant la montagne qui paraissait vouloir se
débarrasser d'eux. Ils savaient que l'hiver engageait là ses dernières
forces et que ce baroud d'honneur ne saurait empêcher le réveil de la
vie sauvage, cette puissance mystérieuse qui déjà verdissait les
pâturages et les agrémentait de l'or pâle des premières jonquilles...